— Tout est ta faute.
Max est dans le lit d’hôpital, vivant et pourtant déjà mort. Mort aux yeux de leurs parents, un échec, face au mouton noir. Pourtant, Faustine ne baisse pas les yeux face à Justine. Si elle baisse les yeux, ce serait admettre qu’elle avait tort.
Elle refuse de l’être. Elle n’arrive déjà plus à se regarder dans le miroir, et la haine dans les yeux de Justine lui brise le cœur, alors elle regarde Max, son respirateur, le moniteur cardiaque. Chaque oscillation est un espoir et une défaite. Il ne devrait pas être là. Elle ne voulait pas l’affronter. Elle a refusé.
Elle aimerait le crier.
Elle a refusé. Elle a essayé de fuir. N’importe quel héros, mais pas Max, pas son jumeau, son autre âme, la lumière dans sa nuit. Un mot de lui et elle aurait arrêté.
Un mot.
Un mot qui n’a pas su passer les lèvres de Maxence.
Pour l’honneur de leur famille, qu’il a dit. Mais quel honneur ? Celui d’être un héros ? D’être un putain de pion à marier ? Celui de ne rien valoir dès que l’on refuse le chemin que d’autres tracent pour nous ? Celui d’avoir un pouvoir si puissant qu’il en devient hors de contrôle ?
— Pourquoi es-tu partie ? Si tu étais restée, si tu n’avais pas fait cette stupide crise d’ado, Max ne serait pas dans le coma ! C’est toi qui l’as mis dans cet état ! Toi et ton foutu égoïsme d’enfant gâtée !
Faustine aimerait hurler, mais les mots restent coincés dans sa gorge, alourdis par la culpabilité et le chagrin, par la rage et le dégoût. Maxence n’aurait jamais dû l’affronter. Et si elle n’avait pas choisi de rejeter leurs parents, si elle était restée sagement sur le chemin tracé pour elle, si elle s’était laissé mourir à petit feu ?
Il faut bien qu’une étoile brûle et meurt pour fournir à la lune la lumière pour briller, non ? Aurait-elle dû être cette étoile pour son frère ?
Les regrets la hantent et la brûlent de l’intérieur ; les promesses tournent cendres, les mots de réconfort poussière. Aucune raison n’est valable. Au fond, Faustine le sait. Elle était la partie pourrie de l’arbre et elle n’a fait qu’en gangréner la sève. Max est tombé parce qu’elle n’a pas su disparaître dans le rôle construit pour elle.
— … Est-ce qu’ils sont venus le voir, dis-moi ? Ou l’ont-ils abandonné, comme un objet usagé jeté à la décharge ?
Les machines hurlent dans le silence et Faustine pleure. Il n’y a même plus de colère, seulement de la lassitude, un vide qui engloutie ses émotions une à une jusqu’à ce qu’il ne reste plus que l’apathie. Elle aurait aimé se tromper, cette fois. Elle aurait aimé entendre Justine dire que leurs parents venaient voir leur fils souvent, qu’ils prévoyaient de prendre les frais d’hospitalisation à leur charge désormais.
Elle aurait préféré entendre qu’au moins Maxence était aimé et non pas cet aveu de leur désintérêt.
— Je… Ils n’ont pas encore eu le temps avec leur travail, tu sais comment ils sont, toujours à droite, à gauche…
La voix de Justine flanche comme ses convictions. Faustine n’a même pas la foi de se réjouir. Elle aurait encore préféré que Justine se berce d’illusions dans le sourire de leur frère. Elle préférerait mille fois être à la place de Max, quitte à crever par manque de soins, seule.
— Ils ne nous aiment pas si nous ne leur sommes pas utiles, Justine. Et Max ne l’est plus, parce qu’il a perdu. Parce qu’il ne se réveillera peut-être plus jamais. Parce que j’ai tué la plus belle part de moi.
Elle n’est qu’une étoile fade parmi des milliers d’autres là où Max était la Lune. Unique, brillant, aimé de tous. Elle n’était que son ombre, insignifiante, indigne d’être appréciée. Mais qu’est-ce qu’une ombre sans le corps auquel elle est rattachée ?
Un fantôme. Un souvenir.
RienUn soupir, alors que Faustine se relève de sa chaise et se dirige vers la sortie de la chambre. Elle paiera tout ce dont Max a besoin. Elle ne sait pas encore réellement comment, mais elle trouvera un moyen de raviver sa lumière, quel qu’en soit le prix ; elle a déjà perdu tout ce qui lui était cher.
— Fais attention à toi. Et ne commets pas la même erreur que lui. Ne te mets pas en travers de mon chemin.
Si le monde doit brûler pour que Faustine puisse revoir le sourire de Maxence, alors elle sera celle qui allumera le brasier.
🟍 Faustine paraît plus jeune que son âge réel ; mieux vaut ne pas lui faire remarquer ou vous ferez parti des gens qu'elle ne peut pas supporter- Chronologie :
01 avril 1979 : naissance de Faustine et de son jumeau Maxence.
Décembre 1986 : Apparition des pouvoirs de Maxence
16 mars 1989 : Naissance de leur petite sœur Justine
Mai 1989 : Apparition de ses pouvoirs
2 septembre 1996 : Entrée à l’Université Saint-Ange.
Juin 1999 : Faust s’arrête après sa licence, écœurée de ses cours et de sa famille qui tente de la fiancer à un bon parti. Elle disparaît des radars.
Septembre 1999 à Mars 2007 : Faustine, sous le surnom de Vilain Faust, s’amuse à ruiner certaines réceptions des grandes familles de héros.
01 Avril 2007 : Maxence sombre dans le coma après que son pouvoir ait échappé à son contrôle en essayant d’arrêter Faustine.
3 Septembre 2007 : Entre à la FEAH en tant que Bibliothécaire Archiviste.