La voix avait tonné dans l'immensité de la caverne qui lui faisait faire un merveilleux écho.

« C'est fermé, on est enfermé ! »

Et puis avaient suivi les premiers cris ou l'angoisse. On avait tenté d'envoyer des messages, mais il semblait que le réseau ne marchait pas, des gens qui avaient tenté d'ouvrir à leur tour la porte qui semblait fixée sur le sol.

« Suivez-moi ! », avait crié une voix de votre côté et vous y étiez allé. Là-bas, il semblait y avoir un passage, l'air était différent. Vous aviez entendu que les souterrains de la FEAH s'étendaient sur des kilomètres, il devait bien y avoir une sortie, non ?

Vous aviez trouvé tant bien que mal un passage qui avait l'air de mener jusqu'à un endroit différent de là où vous faisiez la fête. Si vous ne vous trompiez pas, ça avait l'air d'être un bout des archives de la FEAH. Ces dernières étaient trop calmes pour que cela soit parfaitement normal, un silence religieux régnait presque sur les livres.

Vous saviez qu'il était dangereux de vous trouver ici, il fallait donc trouver la sortie le plus rapidement possible. Michel, ici présent, vous avait montré du doigt un cadavre adossé à une étagère, il tenait une note manuscrite si fermement que l'arracher de ses mains avait failli lui faire sauter une main.

« J'ai trouvé le secret de l'immortalité. Elle est protégée. »

Lorsque Khora s'était retrouvé'e avec le flyer de la soirée d'Halloween entre les mains, iel avait franchement hésité à se rendre. C'est que la dernière fois qu'iel s'était rendu'e dans les sous-sols, iel s'y était perdu'e et on l'avait poussé dans le lac. Mais Khora était bien décidé'e à profiter de tout ce qui faisait le sel de la vie humaine, et la fête d'Halloween semblait être importante pour les humains. Ou du moins, pour les étudiants de la FEAH. Alors, finalement, se disant qu'iel ne risquait rien, entouré'e de plein de ses camarades, iel s'y était rendu'e. Comme plusieurs personnes lui avaient dit qu'iel faisait naturellement peur, Khora décida de ne pas s'ennuyer pour le déguisement cette année. De toute façon, celui de l'année dernière, où iel s'était grimé en inspecteur des impôts, un des pires cauchemars de Scipio, avait été très incompris. Là, iel avait simple. Du khol doré autour des yeux, Une toge grecque noir, des sandales dont les lanières lui montaient jusqu'aux chevilles, et un fin cercle d'or enserrant son front, et lae voilà redevenu Oneiroi le temps d'une soirée.

En entendant Michel crier que qu'ils étaient maintenant tous enfermés ici, Khora regretta quelque peu cette décision. Peut-être qu'il ne servait à rien de lutter, peut-être que son destin était de mourir ici, sous la F.E.A.H, son corps humain rejoignant les milliers d'autres que contenaient les catacombes. Mais au moins, iel avait pu manger des bonbons une dernière fois avant de mourir, donc l'un dans l'autre, ce n'était pas si mal.

Koko prit ma décision de suivre Michel. Iel aimait Michel. Iel le connaissait depuis sa deuxième L1. Michel était calme et gentil, et pas compliqué. Du genre qui pouvait lui parler des heures de jeux vidéos pendant que ellui faisait tranquillement des origamis. Le genre d'interactions qui satisfaisait totalement Khora. Michel les mena jusqu'à ce qui devait être une partie des archives. Finalement, son destin n'était peut-être pas mourir dans les catacombes mais écrasé'e sous une pile de vieux parchemins poussiéreux. Serviable, iel prit le papier que désignait Michel du doigt. Ca parlait d'immortalité. Khora avait été immortel'le pendant des siècles et des siècles et sa conclusion de l'expérience était que l'immortalité, c'était très surfait. Koko tendit le papier à celui ou celle qui le voulait.

Merci, mais je n'ai pas envie de faire d'origami maintenant. Tu sais comment sortir d'ici ?

Morphée avait (très consciemment) pioché dans le punch proposé lors du banquet de la fête d'Halloween. Les étudiants savaient y faire en matière d'alcool, il ne regrettait pas d'être venu ici même si, comme l'aurait dit Philippe, il y avait trop d'étudiants.

À propos de ce dernier, pas la moindre trace de son nez, ni de sa présence.

Dommage.

Lui-même avait acheté trois francs six sous un costume de Link au club de couture et avait un peu modifié son visage pour être encore plus ressemblant. Et voilà, c'était plié, on lui avait même dit au cours des quelques heures passées ici et son cosplay était vraiment top.

Cos-quoi ?

Il avait adressé un ou deux mots à des étudiants habillés de manière un peu bizarre, puis l'alcool lui était monté au nez et il s'était dit qu'il pouvait plus ou moins être une bonne idée que de se tirer. Au moment où le changeforme ou plutôt Morphée avait décidé qu'il pouvait être une bonne idée de passer une deuxième partie de soirée correcte dans un bar d'Avalyon et non en compagnie d'étudiants déguisés, une voix s'écria que la porte était barrée.

Morphée dut un peu s'empêcher de paniquer.

Dans les souterrains de la FEAH. La nuit. À proximité du lac souterrain et pire, des archives. Qu'est-ce qui aurait pu tourner mal ?

Il suivit celui qui avait l'air de savoir où ils allaient pour se retrouver dans une partie des archives qui lui était inconnue. Ce ne fut que là qu'il reconnut la voix tant haïe qui sonnait mal dans les oreilles.

« Waou. Khorra. Quelle présence d'esprit. Des origamis. », il se retourna vers Michel d'un air moqueur. De souvenir, il se souvenait qu'il s'agissait d'un master à présent, il devait être président d'un club, mais lequel ?

Par contre, il ne comprenait absolument pas le déguisement de Khorra. C'était un'e soldat'e romain'e ? Il eut un petit rire et jeta un regard à la note entre les mains de Michel. Il avait tenté d'envoyer un message à Philippe, cette fois, c'était une vraie urgence, mais celui-ci ne partit pas. Morphée râla.

« Enfin. Moi j'dis qu'on ferait mieux de se barrer, très peu pour moi, le secret de l'immortalité. Pis on est dans les archives je vous rappelle, ça pue. Et en plus ça capte quedal. »

Soirée d'Halloween, dans les sous-sols de la FEAH, avec une masse de jeunes adultes et une quantité imprécise d'alcool. Ouais, pas besoin d'avoir fait dix ans de médecine pour savoir que ça ne présageait rien de bon.

C'était pour ça que li medecin.e était présent;e ce soir-là pour la fête. Une partie d'iel aurait largement préféré rester chez iel, au calme en pyjama devant un bol de thé à essayer de rattraper ses heures de sommeil perdues. Ou en tous cas essayer d'appliquer ce programme. L'autre était assez contente d'avoir la chance de se distraire et de quoi s'occuper l'esprit. C'était donc déguisé en un Victor Frankenstein, iel avait déjà les cernes pour aller avec, que Roman était descendu dans les sous-sols.

Et purée, iel ne s'attendait vraiment pas à ce que ça tourne comme ça. Iel avait suivi Morphée et Michel un peu par hasard. Et vu l'état du premier c'était peut-être pas une si mauvaise idée d'être l'adulte responsable du groupe.

Alors, d'accord, la période d'Halloween impliquait son lot de décorations kitsch ou macabres (souvent les deux en même temps). Mais là le mannequin avait un peu trop des airs de réalisme pour son goût. Pas que la vision d'un corps li perturbait plus que ça, iel avait eu son compte de cadavres autopsiés en plus ou moins bon état durant ses études, mais plutôt pour ce que ça impliquait.

Dans le meilleur des cas, que des petit;es rigolo.tes s'étaient dit que piquer dans les réserves des corps donnés à la Science du campus était une super idée. Ce qui franchement d'un point de vue éthique et publicitaire si ça venait à se savoir, n'était pas tiptop comme disent les jeunes.

Dans le pire, Scipio allait être absolument ravi d'avoir la présence des flics dans ses archives pour ouvrir une enquête.

-Oh bordel…

Ouais, en fait Roman aurait certainement mieux fait de rester dormir chez lui. Ou de se torturer l'esprit chez lui.

Roman récupéra le papier pour mieux l'examiner.

-Merci Khora.

D'un côté les propos de Morphée faisaient sens. De l'autre il avait clairement un coup dans le nez et franchement pas la meilleure attitude envers les étudiant.es. Il semblait clair que l'entrée principale était inexploitable, et s'attarder sous terre, aussi proche des archives et d'un plan d'eau glacée avec une troupe de jeunes alcoolisé et paniqué. Ouais non, ça puait plus.

-Si notre entrée d'origine est fermée, il vaut mieux se dépêcher de chercher une sortie ailleurs. Surtout qu'on a un vrai corps sur les bras là.

Roman se pencha d'ailleur sur les pauvres restes pathétiquement laissés là. Et ce que son examen rapide ne lui fit vraiment pas plaisir. Les signes étaient beaucoup trop clairs selon lui.

-Oh bordel de merde… Bon, faut vraiment vite se tirer de là. On a une mort violente sur les bras, potentiellement un homicide.

C’était avec un certain enthousiasme que Marissa s’était rendue à la soirée d’Halloween organisée sur le campus. Plusieurs de ses amis devaient s’y rendre et elle avait espéré les y retrouver pour célébrer les festivités avec eux. Bien que sa cécité ne l’empêche de profiter de l’aspect visuel de la fête, elle avait fait l’effort de réfléchir à un déguisement original pour participer à la tradition.

L’idée lui était venue en écoutant un enregistrement audio de La Vénus d’Ille. Elle voulait se déguiser en statue hantée. Ne pouvant faire ça toute seule, elle avait requis l’aide du club de cosplay pour confectionner sa tenue et la maquiller. Tirant partie de sa peau blanchâtre pour évoquer le marbre, ils n’avaient eu aucun mal à réaliser un déguisement crédible. Les personnes qui l’avaient habillée s’étaient félicitées du résultat, à tel point que Marissa avait regretté de ne pas pouvoir se voir. Le masque qu’on lui avait fourni était apparemment très réaliste, et l’ensemble de son costume la faisait ressembler à une statue d’ange comme on en trouvait souvent sur les lieux de culte, avec de grandes ailes repliées dans le dos.

Une demi-démone déguisée en ange ? L’idée lui avait assurément plu et elle avait hâte de montrer le résultat à ses amis. Malheureusement, la soirée ne s’était pas passée comme prévu. À peine avait-elle eu le temps de partir à leur recherche que la foule s’était mise à s’agiter. Les cris autour d’elle l’avaient informée de la terrible nouvelle : ils étaient enfermés ! En apprenant cela, la jeune femme avait redoublé d’efforts pour trouver les personnes qu’elle cherchait. Elle avait hurlé leurs prénoms, un par un, mais sa voix avait été étouffée par le brouhaha ambiant. Après quelques appels infructueux, elle avait entendu la voix d’un étudiant qui incitait les autres à le suivre et s’était dirigée vers lui.

Marissa suivait désormais un petit groupe de personnes qui se dirigeait elle-ne-savait-où, mené par le jeune homme qu’elle avait entendu plus tôt. Elle avait conscience que trouver ses amis était trop compliqué pour l’instant et préférait donc compter sur l’aide d’autres personnes pour trouver une sortie. Elle ne quitta pas le groupe d’une semelle, espérant qu’ils connaissaient les lieux et sauraient la guider vers l'extérieur.

Après quelques minutes de marche, ils atteignirent une pièce fraiche et silencieuse, loin de l’agitation de la fête qui s’était abruptement interrompue. On trouva un drôle de papier sur lequel quelqu’un prétendait avoir trouvé le secret de l’immortalité. Ça sonnait comme le début d’un mystère un peu bateau comme on en trouvait à la pelle dans les mauvais feuilletons.

Quelqu’un mentionna que le groupe avait pénétré dans les archives et un frison d’effroi parcourut la jeune femme. Oh non, pas encore ! Elle avait eu de la chance d’en réchapper la dernière fois grâce à son démon et ne comptait ne pas y retourner de sitôt. Ce dernier serait-il de nouveau capable de les conduire jusqu’à la sortie ? Marissa avait de gros doutes là-dessus. Dans cette situation, la meilleure solution était de retourner sur leurs pas pour chercher un autre chemin.

« Oui, partons vite d’ici, approuva-t-elle sur un ton nerveux. Il ne nous arrivera rien de bien si on reste dans les archives, il faut faire demi-tour ! »

Elle se tenait à l’affut du moindre bruit, guettant le danger en approche comme lorsqu’elle était perdue aux côtés d’Izuku. Se savoir à nouveau dans ces lieux hostiles l’angoissait fortement. Alors, lorsqu’elle entendit que le groupe venait de tomber sur un cadavre mort dans des conditions atroces, elle se laissa facilement gagner par la panique.

« Un mort ? Quoi ! Mais c’est horrible ! Que lui est-il arrivé ? »

Le terme « homicide » n’était pas sans lui rappeler sa précédente mésaventure dans les archives. Izuku, sous l’influence de son démon, voulait à la base lui tendre un piège. Était-ce là l’œuvre d’un étudiant meurtrier ou bien simplement celle d’un monstre des archives ? Dans tous les cas, cela expliquerait pourquoi la personne avait laissé derrière elle une note aussi inutilement énigmatique. C’était peut-être  un témoignage de ses dernières pensées, grièvement blessée, avant de sombrer dans l’inconscience.

Ça commençait bien, très bien, ce groupe était commposé de personnes hétéroclites qui, manifestement pour certain'e's, n'avait aucune envie de finir ensemble.

Plus le temps passait, plus Michel doutait de son idée. Il était pourtant décidé à aller au bout, « sur un malentendu, ça pouvait passer, non ? »

Il soupira concernant cette histoire d'origamis, il n'aurait jamais pensé que Khora prenne part à leur petit jeu, tellement iel semblait loin de tout cela. En tant normal, il aura ravi de faire de discuter avec Khora. À présent, l'odeur et l'obscurité des archives lui donnait juste envie de finir plus vite sa besogne.

« Euh. »

Le conseiller d'orientation semblait avoir un coup dans l'aile et s'en prenait à leur camarade comme si c'était une distraction très amusante. Un drôle de mec, ce type, il devait avoir un pouvoir de transformation, car il se souvenait qu'il avait l'air différent, tout de même, quand on le croisait dans les couloirs de la FEAH. Parfois même trop jeune.

« M'sieur Doisneau, vous pouvez vous asseoir sur le côté hein. Sinon j'ai du soda, ça devrait vous aider. »

Il fit signe à Khora qu'il gérait et que tout allait bien, tendit une canette de coca au concerné. Le pire, c'était Roman. Michel n'aurait jamais pensé qu'ils n'auraient pas un, mais deux membres du personnel sur les bras – a priori quelqu'un dans la médecine, en plus. Il se mordit les lèvres, se maudissant d'avoir chopé le premier squelette venu au département des sciences. Que foutaient-ils, là-bas ? La dernière à être présente était une étudiante masquée plutôt attachante. Elle avait peur des archives et Michel pouvait le comprendre – lui-même espérait en sortir vivant, dans l'idéal, ce n'était qu'un passage avant de retourner à la pièce principale.

Par précaution, Michel se dirigea vers la porte de secours, la tira.

Elle resta pathétiquement bloquée.

« Merde. »

Il n'était pas prévu que ça se passe comme ça.

« Merde, merde ! On doit vite trouver une sortie, on va devoir traverser les archives !!! »

Pour quelqu'un qui le détestait, le conseiller d'orientation avait un malin plaisir à se mettre sur son chemin. Khora fronça légèrement le nez en sentant la légère odeur d'alcool, qu'iel trouvait personnellement écœurante. Iel recula d'un pas, surpris'e par tant d'agressivité à son égard. Heureusement, Michel géra la situation, et iel l'en remercia d'un hochement de tête. Morphée était cependant d'accord avec ellui, sur le principal. Il fallait partir d'ici, peu importait l'immortalité. Les deux autres personnes qui l'avaient rejoint semblaient peu intéressées par vivre pour toujours aussi, mais peut-être était-ce parce qu'elles étaient trop occupées à paniquer devant le squelette. Khora ne comprenait pas pourquoi. Iels étaient dans les sous-sols d'une vieille institution, construite sur des catacombes, ayant vécu une guerre mondiale... C'était normal d'en trouver quelques uns par-ci par-là. C'était le contraire qui aurait été étonnant. Posément, Khora rappela.

C'est un squelette. Ce qui l'a tué est parti depuis longtemps. Voir mort aussi.

Puis ce fut au tour de Michel de paniquer. Par le Mont Olympe, que les mortels s'effrayaient rapidement. S'en fut trop pour Khora, qui soupira. Mais iel aimait bien Michel, alors iel n'avait pas envie de s'agacer contre lui. Iel posa une main légère sur son épaule. Iel n'avait jamais compris en quoi toucher une épaule était censé rassurer la personne, mais ils faisaient ça dans les livres et les films, alors c'est que ça devait fonctionner.

Inutile d'avoir peur. Si l'on doit mourir dans les archives, c'est que les Moires l'avaient décidé ainsi. Avançons.

Parce que à choisir, Khora préférerait tout de même vivre ses derniers instants dans un endroit un peu plus calme et confortable que les froides, poussiéreuses (sentant même le papier moisi par endroit) et silencieuses archives qui étaient d'un coup devenues très bruyantes. Joignant le geste à la parole, iel se mit en route.

Morphée ricana, ayant peu conscience des collègues ou élèves à part Khora qui pouvaient se trouver dans cette pièce.

Tout ce qu'il voyait, c'était ce squelette. Ce squelette et ce ridicule bout de papier qui promettait une chasse au trésor à l'immortalité.

Ça, ça ressemblait à ce qu'on pouvait trouver dans les archives : multitudes de bouquins tous plus polissés les uns que les autres, chacun avec leurs rêves de gloire. Un ramassis de mensonge pour les amener tout droit vers le piège d'il ne savait quelle créature.

Il adressa un petit salut à Roman, se demandant seulement s'iel l'avait reconnu (probablement, fallait dire qu'il ne s'était pas trop retouché, pour ce costume). La dernière élève présente, hormis celui en master, devait être une première année étant donné qu'il ne la connaissait pas. Pauvre gosse.

« Ah. Euh. Merci. », il avait écouté Roman d'une oreille et il semblerait que le type à l'état de squelette avait péri d'une mort violente. Raison de plus pour se casser rapidement d'ici. Il versa quelques gouttes de coca dans sa gorge et se sentit un peu plus euphorique.

« Très perspicace, Khora. Une vocation dans la police scientifique, plus tard ? », il fit mine d'applaudir, mais avec la canette dans les mains, ça parut plus ridicule qu'autre chose.

Et ledit Michel semblait avoir découvert que la porte était une porte coupe feu. Peut-être même avait-elle été posée là pour empêcher quelque chose de sortir des archives. Autrement dit, ce gosse, qu'ils avaient tous suivi, les avait emmené tout droit vers un guet-apens.

« C'est dingue. Vous entendez ça ? C'est pas la peine d'avoir peur. », il rit un peu. « Toi, avec le masque, calme-toi. Pas la peine. C'est juste les archives, il y a des monstres qui veulent probablement vous sucer la moëlle des os. Mais on avance groupés et on prie pour que les Moires...c'est pas des meufs qui prédisent le futur ça ? Ne nous attrapent pas. »

Il appuya une main sur l'épaule de Khora et avança avec ellui vers un endroit qu'on supposait être le début des archives, étant donné que c'était sombre, un peu inquiétant et surtout bourré de livres.. Khora l'agaçait : toujours le bon mot, toujours des évidences. Il ne savait pas comment iel s'intégrait à la FEAH, mais iel le faisait, c'était à proprement dire rageant.

Son souffle était court, il avait l'impression de dégriser rapidement.

Il avait peur.

Soirée de merde, était un euphémisme pour ce qui se dessinait à l'instant. Et Roman avait l'impression que sur les deux personnes supposément adultes et responsables, iel n'allait en réalité pouvoir compter que sur lui.

Li docteur.e foudroya du regard Morphée, vu la situation sa patience avait fondu à une vitesse beaucoup plus importante que d'habitude. Et si les commentaires de Khora n'avaient rien de rassurant, ils n'étaient pas insultants et odieux pour autant (Roman avait aussi l'impression que le comportement général de morphée venait plus d'une forme de neuroatypie qu'autre chose, mais iel ne s'était pas assez penché sur son cas pour émettre un vrai diagnostic).

-Morphée, si c'est pour être odieux envers les jeunes en plus d'être inutile, tu peux garder tes commentaires pour toi. Merci.

Iel se montrait rarement aussi sec, mais là iels n'avaient clairement pas besoin que les propos imbibés du conseiller d'orientation viennent mettre de l'huile sur le feu. La priorité était de calmer les troupes et de voir s'iels pouvaient s'en sortir sans passer par les Archives.

-On se calme, personne ne va mourir ce soir. On va tous rester ensemble, veiller les uns sur les autres et sortir rapidement d'ici.

Iel se voulait rassurant.e et bienveillant.e cachant derrière un sourire doux le fait qu'iel n'était en réalité pas plus rassuré.e.

-Allez les jeunes, ça va aller, je garde un oeil sur vous.

Un squelette ? C’était déjà moins inquiétant que de trouver une personne fraichement décédée mais ça n’en restait pas moins sordide. Marissa se sentait très mal et avait hâte de quitter cet endroit avant qu’un malheur ne leur tombe dessus. Autant dire que si elle avait encore eu un visage, il se serait décomposé en apprenant qu’ils étaient de nouveau enfermés, cette fois-ci dans un obscur recoin des archives. Pour ne rien arranger, deux personnes du groupe se permettaient de remuer le couteau dans la plaie en évoquant la mort et les créatures sanguinaires qui hantaient les lieux.

Leurs noms avaient été révélés au cours de la conversation. Il y avait Khora, une personne semblant détachée de la situation qui se disait prête à mourir s’il tel était son destin. Et puis, il y avait aussi Morphée Doisneau, le conseiller d’orientation. La jeune femme ne l’avait jamais rencontré mais connaissait son patronyme. Pour un membre du personnel, il faisait peine à entendre.

Ce dernier était ivre. La manière dont il s'exprimait trahissait son état. Marissa n’aimait pas cela. Ça le rendait très désagréable, surtout envers l’étudiant appelé Khora. Elle espérait qu’il n’ait pas trop l’alcool mauvais. Elle ne comprenait vraiment pas pourquoi des gens s’obstinaient à boire autant, jamais elle n’oserait s’y risquer. Personnellement, l’idée de ne plus être totalement maître de son corps et de son esprit la terrifiait au plus haut point, une peur sans doute exacerbée par ses nombreuses recherches sur les démons parasites.

Une voix inconnue reprit l’homme éméché sur l’irrespect dont il faisait preuve avant de rasséréner tout le monde. Bien qu’elle ne connaisse pas cette personne, Marissa comprit immédiatement qu’il s’agissait de la plus responsable et raisonnable du groupe. Si elle tremblait toujours à l’idée de remettre les pieds dans les archives, la présence d’une figure un tant soit peu rassurante sur laquelle elle pourrait s’appuyer l’apaisait un peu.

« S… si ça ne vous dérange pas, je vais rester près de vous, dit-elle en s’approchant à côté d’ellui. Je dois vous prévenir. Je suis aveugle, complètement aveugle, et j’ai très peur. Je suis déjà descendue dans les archives. Quelqu’un m’y a emmenée il y a quelques temps, sans me prévenir que c’était dangereux. Nous avons eu beaucoup de chance de ne pas y rester. »

Quitte à être forcée à traverser les archives, autant être transparente sur les raisons de sa crainte.

« Je m’appelle Marissa. Et vous, comment vous appelez-vous ? »

Le conseiller d'orientation semblait en dehors de tout contrôle, aussi Michel se dépêcha-t-il d'arriver au niveau de Khora et du blond pour anticiper tout acte plus ou moins violent qu'il aurait pu commettre.

Il ne pensait pas que ça arriverait, mais il préférait être là, au cas où.

D'ailleurs, il les sépara pour se mettre entre les deux, serrant la main droite de Khorra et la gauche de Morphée.

Il avait sans doute fait peur à la petite avec le masque. Elle avait raison en plus : aller dans les archives était très imprudent, alors il approuva Roman de la tête qui avait su, malgré tout, trouver les bonnes paroles pour calmer tout le monde.

Il espérait qu'il ne changerait pas Khorra ou Morphée en bois à cause de son pouvoir explosif ; ce serait gênant. Il se demandait aussi quand il devrait leur dire pour cette histoire de jeu de rôle – il n'était pas allé bien plus loin et surtout, n'avait pas prévu le coup de la porte.

« Quelqu'un ? », il tourna la tête vers Marissa. C'était bizarre quand même. Il lui semblait que l'accès aux archives était interdit. « Enchanté Marissa, je suis Michel. »

Il faillit rajouter « votre MJ pour la soirée » mais se retint à temps. À côté de lui, il pouvait écouter la respiration incertaine de Morphée – il comprenait qu'il avait peur, lui aussi, même s'il ne n'exprimait pas beaucoup. Il resserra sa prise autour de sa main.

« Quelqu'un peut éclairer le chemin ? Mes deux mains sont prises et nous n'y voyons rien. Il faut que nous réussissions à nous éloigner. »

Il ne savait pas jusqu'où le bloqueur de réseau fonctionnait, sans doute fallait-il encore gagner quelques mètres pour appeler à l'aide, au moins Scipio, pour prévenir de l'extérieur les autres membres du club que ce n'était pas la peine de continuer la partie.

Si iels survivaient à cette nuit, Morphée allait le regretter. Pas à cause de la gueule de bois qu'il allait avoir au réveil, pas seulement du moins, mais parce que Khora allait hanter ses rêves et les changer en cauchemars jusqu'à ce qu'iel se lasse. Et la rancune d'un être (anciennement) immortel pouvait être très longue. Iel n'aimait pas du tout la façon dont il se moquait de ellui, ou la désinvolture avec laquelle il parlait des Moires, ses demi-soeurs. Si le blond ne l'avait pas aidé de façon désintéressée quelques années plus tôt, iel aurait même souhaité qu'Atropos ne tarde pas à couper le fil de Morphée, qui ne méritait définitivement pas de porter le nom de son aîné. Mesquin'e, Koko rajouta une couche aux remontrances de Roman :

Ce n'est rien. Il est juste contrarié car il aurait préféré être enfermé avec Monsieur Bruyère plutôt qu'avec nous.

On apprenait définitivement beaucoup de choses en arpentant les rêves. Suffisamment pour regretter aussi que le concierge ne soit pas là pour pulvériser la porte d'un cri ou ne pas se sentir rassurer lorsque le docteur déclarer garder un œil sur eux. L'ancien Oneiroi se figea en sentant la main de Morphée se poser sur son épaule. Déjà qu'iel n'aimait pas qu'on lae touche, alors quelqu'un d'aussi hargneux que le conseilleur d'orientation... Mais iel était trop perplexe pour se dégager. Pourquoi essayait-il de le rassurer, après avoir été aussi méchant avec ellui ? Se sentait-il coupable suite aux remontrances du docteur ? Heureusement, Michel intervint encore, prenant sa main. Pourquoi tout le monde voulait tenir sa main dernièrement ? Mais venant de Michel, ça ne lae dérangeait pas. Au contraire, iel trouvait sa chaleur agréable dans la fraîcheur des lieux. Si iel avait su, iel aurait pris un déguisement plus chaud. Khora choisit cependant de le lâcher, restant à ses côtés. Iel n'avait pas pris son portable.

Tu as une main de libre maintenant.

Imitant son camarade, iel se présenta aussi auprès de la jeune femme aveugle. Ce n'est pas non plus elle qui serait utile si leur petit groupe tombait sur un des Gardiens, qui eux étaient une menaces réelle, contrairement aux monstres suceurs de moelle qui ne devaient exister quand le cerveau embrumé de Morphée. Mais qui ferait une bonne base aux cauchemars qu'iel allait filer aux blond.

Je suis Khora.

Outch, ça tapait mais bizarrement, il en voyait de plus en plus le bout.

À croire que la peur, fidèle compagnonne, l'aidait à refaire surface. Morphée grogna, imprimant dans sa tête la remarque de saon collègue Roman comme si ce n'était pas lui, mais un total étranger qui avait pu parler juste avant.

Et combien même, c'était un peu mérité, non ? Ce n'était pas comme si Khora était innocent'e, comme si iel ne méritait pas qu'on dise tout cela à son sujet.

« Mphr. T'as sans doute raison, je suis un sale con. »

Il avait peur, on lui avait longtemps parlé des archives, de la manière dont elles pouvaient absorber les êtres vivants, il avait peur. Alors évidemment, ce n'était pas une excuse pour cibler un'e étudiant'e comme bouc-émissaire, encore moins pour se foutre de la gueule d'une autre tout en délirant sur la probabilités qu'ils auraient pour clamser dans un recoin obscur.

Il faillit rajouter quelque chose, mais déjà Khora enchaînait sur Philippe et le visage de Morphée ne put s'empêcher de se teinter de rouge. Un rouge cramoisi, il ne fit même pas de remarque à Michel car il était encore sous le choc.

Comment savait-iel ? Pourquoi aussi ? Il pensait qu'il était resté discret, alors comment ?

« Je. Mais n'importe quoi, c'est juste un collègue ! », baragouina-t-il de manière un peu trop précipité, son imagination partant aussitôt sur la soirée karaoké de l'autre jour. Ça et le fait qu'il serait tellement plus rassuré si le Moineau était avec eux en ce moment.

« Morphée. », grogna-t-il pour se présenter. Il se concentra pour reprendre sa forme normale, sans déguisement de Link, juste lui comme conseiller d'orientation sans la balafre. Ce serait sans doute plus simple s'ils étaient attaqués.

« On avance ou on tente de défoncer la porte coupe-feu ? »

Si la situation n'avait pas été aussi catastrophique, Roman aurait sans doute émit un gloussement en entendant la pique de Khora à l'intention de Morphée. Cela dit, iel ne pouvait pas lui donner vraiment tort, Philippe avait un côté très rassurant. Quitte à être coincé dans un scénario de film d'horreur, autant l'être avec Philippe Bruyère. On avait l'impression que les chances de survie augmentaient comme ça.

-Pas de soucis, Marissa. Tu peux prendre mon bras si tu veux. Je suis li Dr. Oberoi, li médecin.e du campus.

Iel nota de particulièrement veiller sur la jeune femme. Même si de son propre aveu elle avait survécu une première fois aux archives de cette fac de tarés, ce n'était pas une raison pour lui compliquer la vie.

-Je pense qu'au vu de la situation, il serait sans doute plus avisé de traverser prudemment et rapidement les archives. Nous pourrons trouver du secours dehors pour les personnes encore coincées dans la grotte.

Tout le monde se présenta et Marissa se sentit rassurée de pouvoir mettre un nom sur chaque voix. Ça lui donnait quelques repères, ça la sécurisait. En plus, l’un d’eux se révélait être li médecin·e de la fac. Elle tâtonna un peu avant de parvenir à poser sa main sur le bras de ce·tte dernier·ère.

« Merci, c’est très gentil. »

Elle faillit acquiescer lorsque Morphée évoqua l’idée de défoncer la porte coupe-feu mais se ravisa rapidement en prenant conscience d’une chose.

« Ça peut paraître bizarre, mais je pense qu’iel a raison. Les créatures des archives sont attirées par le bruit et les lieux résonnent fortement. Si l’on n’est pas sûrs de pouvoir abattre la porte du premier coup, elles entendront notre vacarme et viendront à nous. C’est plutôt risqué quand on y réfléchit. »

Alors qu’elle disait ça, une flopée de livres volants se rua dans leur direction, comme pour leur confirmer qu'ils étaient bel et bien exposés au danger. La jeune femme se crispa lorsqu'elle les entendit planer au-dessus de leurs têtes.

« J’en ai déjà rencontré. Ils sont inoffensifs. »

À part attendre devant la porte que quelqu’un l’ouvre par inadvertance, au risque de se faire surprendre par des monstres plus féroces, le mieux était donc de s’engager dans le dédale de livres à la recherche d’une sortie comme li docteur·e l’avait suggéré.

« Très bien, puisque nous n’avons plus le choix, allons-y, chuchota-t-elle avec une voix légèrement moins tremblante. Il y a un ascenseur quelque part dans les archives. Une sorte de plateforme sur laquelle il faut monter. Si nous arrivons à la trouver, elle nous emmènera dans la bibliothèque du campus. »

C'était quand même étonnant, une étudiante qui leur expliquait comment survivre aux archives. De mémoire, l'accès à cet endroit était interdit et tous semblaient plus vouloir s'en éloigner que tenter de chercher la perle rare leur promettant le Graal.

Bizarre donc, mais cela ne le regardait pas, au fond : il était bien le premier à entrer les archives pour préparer son GN, ce que faisait les autres étudiants ne regardaient donc qu'eux.

C'étaient tout simplement des livres volants. Des livres volants qui passèrent au dessus de leur tête en remplissant les archives de leur bruissement d'ailes. Lui, tout ce que ça lui évoqua, ce fut éventuellement cette scène du Seigneur des anneaux dans la montagne avec les oiseaux, espions pour Saruman, mais il n'en dit rien, pour ne pas affoler. En tout cas, Michel eut un drôle de mauvais pressentiment.

« Ouais, on va éviter de faire du bruit. »

Khora lui avait lâché la main, il le regretta presque, cela le tranquillisait. Il li regarda avec un mince sourire désolé, avait aussi manqué un gloussement lorsqu'il avait parlé de M. Bruyère, épinglant ainsi le conseiller d'orientation et prouvant qu'iel savait bien se défendre.

« On avance, donc. Meilleure idée en effet. On ferait mieux d'avancer rapidement, même si ces livres sont inoffensifs, j'ai lu trop de fantasy pour me dire qu'ils sont vraiment innocents. », il se tourna vers Roman qui semblait vraiment être rassurant'e : enfin un membre du personnel compétent, se disait-il (enfin, ça, c'était avant de lui avouer qui les avait mis dans cette merde noire)

« Vous savez comment vous diriger dans les archives ? L'un d'entre vous ? », il regarda Marissa. « L'un d'entre vous sait quel chemin prendre ? »

Très satisfait'e que sa pique ait eu l'effet escompté, Khora écoutait les autres échangert, enfin surtout Marissa, sur ce qu'il convenait de faire. L'ancien Oneiros ne comprenait pas pourquoi une jeune humaine aveugle s'était déjà perdue dans les archives, les parchemins et manuscrits étaient rarement écrits en braille, mais iel n'allait pas s'en plaindre. Ils furent momentanément interrompues par une volée de livres sauvages. En les voyant foncer vers eux, Koko se posa LA question : Est-ce que si iel faisait un avion ou un oiseau en papier avec l'une de leurs pages, l'origami s'envolerait aussi ? Iel tendit les bras et sauta pour tenter d'en attraper un. Malheureusement, iel ne réussit qu'à arracher une bonne partie d'une feuille de l'un des livres, qui se déchira dans un petit bruit couvert par celui des 'ailes' de papier. Iel la regarda dans sa main, avec une très légère moue déçue des lèvres. En plus elle était en latin, ellui s'était le grecque ancien son truc. Comme si de rien était, iel plia la feuille pour la glisser dans sa ceinture. Un ascenseur donc.

Nous n'aurons qu'à rebrousser chemin si nous croisons un autre squelette.

C'était un plan comme un autre. Se baser la présence de cadavres, de meubles cassés, ou de traces de sang pour deviner si le passage emprunté était sûr ou pas. Et lae quatrième année commençait à s'impatienter. Ca faisait au moins cinq minutes qu'iel avait décrété qu'ils devaient avancer, et ils étaient encore à se décider quoi faire. En ayant assez, iel attrapa le poignet de Michel pour le tirer, afin d'amorcer le mouvement.

Il faudrait marquer les endroits où nous passons. Si nous devons rebrousser chemin, nous nous perdrons pas. Mais je n'ai rien pour ça.

Iel se rappela de la fois où iel avait erré des heures dans les sous-sols avant de tomber miraculeusement sur un autre étudiant. Mais là, il n'y aurait sûrement pas d'Orphée pour sauver le groupe d'Eurydice qu'ils étaient. Et peu de personnes rêvant des archives (sûrement parce que la plupart de ceux qui les connaissaient bien étaient soit morts, soit des Walking Readers) iel n'avait pas beaucoup de donnés sur l'ensemble de l'endroit. Ellui-même n'y était quasiment jamais allé'e, et jamais bien loin. Autant mettre toutes les chances de leur côté.

Bon, au moins Morphée semblait commencer à reprendre ses esprits. Roman fouilla un instant dans une des poches de la blouse de son costume, il lui semblait avoir quelque chose qui pourrait aider à éponger l'alcool. Ah, voilà ! Iel sortit une barre chocolatée dans son emballage argenté, c'était très gras et très sucré. Donc parfait dans cette situation. Il tendit la friandise à morphée avant de retourner fouiller dans ses poches pour en sortir un stylo quatre-couleurs.

-Est -ce que ça irait pour marquer notre chemin ?

Oui, iel avait beaucoup de choses dans ses poches. Cela dit, ce serait un fil d'Ariane de fortune, une pelote de fil d'or magique serait très appréciée là.

-Et pour ma part j'ai suivi une voix qui appelait. Sur le coup ça m'a paru préférable que de me précipiter sur une entrée annoncée comme bloquée.

Pas dit que le choix serait identique rétrospectivement.

-Peut-être que l'on pourrait essayer d'envoyer un SOS par les livres volants ?

« Non, je ne sais rien de plus malheureusement, prévint-elle lorsque Michel demanda si quelqu’un savait se diriger à travers les archives. »

Considérant qu’il s’agissait de leur meilleure option, le groupe s’apprêtait à traverser l’immense dédale de livres. Morphée et Roman émirent toutefois quelques suggestions avant de partir, dans l'espoir de mettre toutes les chances de leur côté. L’endroit était un vrai labyrinthe, aussi valait-il mieux trouver un moyen de marquer leur chemin pour éviter de tourner en rond ou pour pouvoir faire demi-tour en cas de nécessité. Marissa, qui n’avait rien sur elle mis à part son costume, réfléchit à un moyen de compléter la proposition de Roman.

« Hum… Toute manière de baliser notre chemin est bienvenue. Pourquoi ne pas en utiliser plusieurs pour rendre le chemin encore plus facile à retrouver ? On peut aussi briser les ailes de mon costume et semer des morceaux à la manière du Petit Poucet. C’est du polystyrène recouvert d’une légère couche de plâtre, ça ne devrait pas s’envoler si on en laisse au milieu des allées. »

Il n’y en aurait pas assez pour baliser toute la route, mais le blanc du costume se verrait de loin avec les lumières des portables.

« Moi aussi je n’ai fait que suivre le groupe, répondit-elle à Morphée. J’imagine que l’un de nous a vu une porte et a cru qu’il s’agissait d’une sortie vers l’extérieur. C’était… c’était une mauvaise idée mais on ne peut pas lui en vouloir. Comment aurait-il pu savoir que cette porte menait tout droit vers les archives ? »

Une autre idée consistait à avertir l’archiviste, ou du moins à essayer. C’était la seule personne habilitée à descendre dans les archives et probablement la seule à pouvoir s’y diriger. Marissa approuva donc lorsque li médecin.e proposa d’utiliser les livres volants pour tenter de la contacter.

Inconscient'e des efforts que faisaient Michel pour ne pas attirer l'attention sur lui, Khora le vendit sans aucun d'état d'âme, tout en le défendant auprès de Marissa qui avait insinué que son ami avait eu une mauvaise idée.

J'ai suivi Michel. C'est lui qui a vu que la porte était bloquée dans la caverne. Et c'était une meilleure idée de chercher une autre sortie plutôt que de rester avec les autres qui criaient. Les cris n'ont jamais ouvert une porte. Sauf ceux du concierge, mais il n'était pas là. Vous avez beaucoup de choses dans votre sac, Docteur'e Oberoi, c'est très pratique. Le stylo devrait fonctionner si on fait des marques assez grosses, comme le trait est fin.

Tout en parlant, Khora continuait à tirer la manche du rouquin pour qu'il lae suive, s'enfonçant dans les archives. Etre changé'e en bois ne paraissait pas l'inquiéter plus que ça. Daphnée, Syrinx, Cyparissus, ce genre de transformations étaient arrivés à plein de gens. Et ils ne devaient pas être malheureux ainsi, comme ils n'étaient jamais redevenus humains. Et puis, il y avait un aspect pratique insoupçonné dans leur situation.

Si tu te transformes en bois, tu seras plus difficile à tuer.

Puis qu'on en était déjà aux idées désespérées, du genre écrire des mots sur des livres volants sauvages en espérant et de un, qu'ils aient la gentillesse de trouver un des archivistes dans les prochaines heures, et de deux qu'un archiviste soit encore en train de travailler à cette heure-ci, Khora proposa la sienne.

Je peux essayer de prier les dieux. Mais il me faudrait un briquet ou des allumettes.

Si iel brûlait des offrandes, peut-être que son cousin au quatrième degrés Hermès, dieu des voyageurs et des égarés, accepterait de leur montre la voie. Ou un autre de ses cousins du quatrième degrés, Héphaïstos, voudrait bien leur envoyer une des nombreuses armes de la Forge. Mais Koko avait une famille très grande et très compliquée, mieux valait ne pas trop compter dessus.

En travers du chemin, un mort. A la limite entre un squelette et un cadavre, en train de se décomposer, il est vraiment mort et ne vous embêtera pas.
Il a un bout de papier dans la main, comme s'il avait tenté de faire un plan des archives à partir de l'endroit d'où il est entré.

-Je fais dans la guérison, je peux infliger de la douleur aussi dans l'idée mais il me faudrait être au contact de ma cible. Et qu'elle puisse ressentir la douleur aussi. Je crains de ne pas être d'une grande aide d'un point de vue offensif.

Roman regarda un moment Michel, assez perplexe, quand la révélation que c'était lui qui avait découvert que la porte du lac était verrouillée tomba. Y avait quelque chose qui collait pas dans toute cette histoire, son côté The Eye frémissait. Ce n'était cependant pas le moment.

-Nous aurons tout le temps d'enquêter sur les évènements de ce soir une fois sortis d'ici, décida-t-iel voix haute pour tenter de couper court à cet aspect de la conversation.

Iels avaient d'autres chats à fouetter pour le moment. Comme de dissuader Khora d'allumer un feu dans les Archives;

-Euh, merci de la proposition Khora mais je pense qu'il est préférable d'éviter le feu avec autant de papier autour de nous.

Plus ça allait, plus Roman doutait sérieusement de leurs chances de s'en sortir vivants. Et le pire plus à cause des conflits internes du petit groupe plus qu'à cause des dangers natifs des Archives. C'était assez ironique d'une certaine façon.

Iel était concentré.e sur le fait de guider Marissa de son mieux quand iels trouvèrent la carte. Finalement peut-être que la providence était de leur côté.

-On va pouvoir suivre un itinéraire à priori fiable !

Enfin une foutue bonne nouvelle. Cela dit ce qui l'inquiétait c'était la cause de la mort du pauvre cartographe… S'iel ne s'était pas perdu qu'est ce qui l'avait fait ?